Fils des peintres Jürg Kreienbühl et Suzanne Lopata, Stéphane Belzère est diplômé de l'École des beaux-arts de Paris. Dans ses premières peintures influencées par le réalisme familial, il documente la collection des plâtres antiques abandonnés dans les sous-sols des Beaux-Arts et, à Berlin où il possède un atelier, les no-man's land de la capitale après la chute du mur.


Débutée en 1995, sa série de peintures, "Les bocaux anatomiques", marque une évolution importante dans son travail. Dans la salle des "Pièces Molles" du Muséum national d'Histoire naturelle de Paris, près de la grande galerie de l'Évolution où son père avait travaillé quelques années auparavant, il peint directement des cerveaux et des organes d'animaux conservés dans des bocaux de formol. Ce motif devenu obsessionnel, source d'attraction et de répulsion, offre une possibilité de dialogue entre les chairs et la matière de la peinture, magnifiée par les couleurs et la transparence du liquide. Il poursuit cette thématique, non sans humour, dans ses "Tableaux-saucisses" à partir de sa propre collection de bocaux alimentaires. Une observation détaillée des sédiments déposés au fond des bocaux de préparation anatomique est à l'origine des "Tableaux longs" ; les strates de matières délitées, agrandies par l'effet grossissant des verres, évoquent indifféremment des paysages glaciaires et intérieurs, des mondes réels et imaginaires, entre figuration et abstraction.

Lauréat en 2003 du concours pour la réalisation des vitraux de la cathédrale de Rodez, il conçoit un ensemble figuratif et narratif achevé quatre ans plus tard, en collaboration avec les ateliers Duchemin. Afin de traduire le mystère de la vie et son perpétuel renouvellement, il combine l'iconographie religieuse avec des images tirées de la biologie et des formes issues de ses bocaux anatomiques. Symbole de la pensée divine dans ses vitraux, le motif d'IRM de cerveaux est repris puis développé dans une série de pochoirs à la gouache.

Parallèlement, il n'a cessé de s'attacher à la figure humaine. À Berlin, entre 1995 à 2013, il réalise un ensemble de sept cents petits autoportraits, appelés "Reflets nocturnes" ; à la manière d'un journal intime, il se peint souvent nu, à travers le reflet de la fenêtre de sa cuisine qui superpose son corps et la ville. En accompagnant la fin de vie de son père décédé en 2007, il exécute des portraits de sa famille confrontée à la maladie, y compris des peintures ovales de son père sur son lit de mort. Depuis quelques années, il a commencé une série d'aquarelles nommées "Diaquarelles", d'après des diapositives familiales et publicitaires collectées auprès de proches, d'amis ou d'anonymes : en explorant des images analogiques délaissées et retranscrites avec leur cache et leurs inscriptions, il dresse un panorama subjectif d'un monde révolu, ancré dans la mémoire collective.

Son travail révèle un monde étrangement réel qui unit l'informe et la forme, l'organique et la chair, l'intérieur et l'extérieur. Chacune de ses séries trouve sa source dans une œuvre antérieure et tisse un fil invisible entre ses sujets qui s'approfondissent à mesure : la conservation des chairs, la production alimentaire, la représentation du corps, le cerveau et la mémoire… À partir d'une description minutieuse de la réalité, si exacte qu'elle en devient parfois abstraite, Stéphane Belzère cherche à voir à travers le visible, comme par transparence, la vie des formes et les formes de la vie.

 

Il a bénéficié de plusieurs expositions muséales, comme Mondes Flottants au MAMCS, Le projet des tableaux longs - Prix Fems au Musée de Pully à Lausanne, Peintures etc… au Musée Denys-Puech à Rodez, Peintures en bocal/bocal de peinture au Musée de Zoologie de Lausanne. Son oeuvre figure dans plusieurs collections publiques et privées : Kunstmuseum Basel, FRAC Île-de-France, Musée d'Art Moderne et Contemporain (MAMCS) de Strasbourg, Fondation d'art contemporain Daniel & Florence Guerlain, Fondation Edouard et Maurice Sandoz, Christoph Merian Stiftung…